MANIFEST

Mémoire relatif à l'arrivée du Cte de Grasse

Title:
Mémoire relatif à l'arrivée du Cte de Grasse
Creator:
Charles-Antoine Du Houx, Baron de Vioménil
Date Created:
1781-08-01
Source Identifier:
124

1

Mémoire relatif à l’arrivée de M. le cte de Grace dans l’Amérique septentrionale, et à la situation de l’armée des alliés au camp de Philipsburg .

Comme on doit supposer que M. le cte de Barras n’aura pas perdu un instant depuis le retour de la Concorde pour faire embarquer les trouppes, l’artillerie de siège, les poudres et les autres effets du roy laissés dans les magasins de Providence et de Newport , on doit se flatter que sa réunion à M. de Grace n’éprouvera ny retard ny difficulté, et qu’elle s’opérera suivant toutte apparence avant le 1er 7bre.

Dans cet état des choses et dans l’impossibilité de tenter le siège de New York , vu l’insufisance des moyens que les américains et leurs alliés peuvent réunir pour une attaque de cette importance, je pense qu’il n’y a pas à balancer à porter dans le sud touttes les trouppes françaises aux ordres de M. le cte de Rochambeau pour les réunir dans un point donné à celles que M. le cte de Grace amènera à sa suitte , et à les faire opérer sur le champ et avec la plus grande vigueur conformément au plan déterminé par le général Washington et M. le cte de Rochambeau dans leur conférences particulières, et comme il n’y avait pas un moment à perdre pour remplir ces différents objets et que les français campés à Philipsburg pouvaient se rendre en huit marches sur les points de la Delaware qui leur seraient indiqués, après avoir accompagné l’armée américaine jusqu’à la position qu’il aurait plu au général Washington de choisir. Relativement à cette nouvelle disposition, on proposerait de convenir avec


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M. de Grace qu’il vint croiser en avant et à hauteur des caps de la Delaware , et que ce fut dans cette rivière ou à son embouchure que les trouppes françaises aux ordre de M. le cte de Rochambeau fussent embarquées pour être portées ensuitte dans la baye de Chesapeack , à Charlestown , ou tout autre point ordoné par le général Washington

M. de Béville et un commissaire des guerres, ordonnés à l’avance pour reconnaître les camps à prendre, et les subsistances que l’on pourait se procurer, entre la rivière du Nord et la Delaware , pourraient aussi s’assurer à Trenton , Philadelphie , Chester et autres lieux, de tous les bâtiments qu’il faudrait ajouter à ceux qui seraient fournis par l’escadre, pour le transport des trouppes et des effets de l’armée.

A l’arrivée de M. de Grace dans l’Amérique septentrionale M de Cornwallis doit naturellement regagner Charlestown de vitesse. S’il s’était obstiné à rester à Porthmouth , il y serait tellement compromis qu’il n’y aurait pas à balancer à l’y attaquer après avoir débarqué les trouppes avec sûreté dans la baye de Chesapeack . Suivant toutte apparence il serait battu et peu être pris. Si au contraire il est rentré à New York ou à Charlestown , la Virginie sera délivrée, et il ne sera peu être pas impossible d’attaquer les anglais avec succès, dans Charlestown ou à Savanah .


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Ces différentes tentatives prouveront du moins à l’Amérique que nous l’avons servi dès que nous en avons eu les moyens. J’ajouterai à ces réflexions que si les trouppes amenée par M. de Grace ne doivent pas nous rester cet hyver, il faut les employer sans perte de tems, que toutte entreprise sur New York , indépendemment de la très grande incertitude du succès, entrainerait à des dispositions préalables si lentes soit pour se procurer les subsistances, soit pour les transports et approvisionnements nécessaires pour une aussi grande tentative qu’il ne resterait aucune espérance de pouvoir s’emparer de cette place avant la fin de cette campagne, qu’il faut toujours se rappeller qu’elle est défendue par une escadre embossée dans le Hook , et gardée par dix mille hommes de trouppes habituées depuis cinq ou six ans aux événements de la guerre, et dont les chefs qui ont de la réputation ont à soutenir à la face de l’univers la cause la plus intéressante, et la plus décisive pour leur nation, qu’il faudrait au moins huit ou dix mille hommes sur Long Island , huit mille sur le point de Kingsbridge , et quatre mille à Staten Island , pour resserrer les anglais dans New York et leur oser toutte espèce de communication avec le continent sur les deux rives de la rivière du Nord , pour les attaquer avec qquelque espérance de succès, en suposant encor que M. le cte de Grace au préalable de tout aurait passé la première barre du Hook


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et y serait entré avec la totalité de son escadre. Si ces différents objets ne peuvent pas être remplis en totalité toutte entreprise sur New York pourait entrainer des suittes si facheuses, et si humilianttes, qu’on ne doit pas craindre qu’elles soient jamais déterminées par les généraux qui nous commandent, dont l’expérience et la sagesse sont si connues, qu’ils feront sans doutte partout ailleurs le meilleur usage, et les plus utiles à la cause de l’Amérique, des moyens passagers qu’ils vont avoir entre leurs mains.


1

Memorandum concerning the arrival of M. le cte de Grace in North America
America, and the situation of the allied army at the camp
of Philipsburg.

As one must suppose that M. le cte de Barras will not have lost
an instant since the return of the Concord to have embarked
the troops, the artillery of siege, the powder and the other effects of
the king left in the stores of Providence and Newport,
one must trust that his meeting with Mr. de Grace will not experience
delay nor difficulty, and that it will take place according to all
appearance before the 1st of February.

In this state of affairs and in the impossibility of attempting
the siege of New York, given the inadequacy of the means that
the Americans and their allies can muster for an
attack of this importance, I think that there is no need to hesitate
to carry all the French troops to the south
to the orders of M. le cte de Rochambeau to unite them in a given point
point with those that M. le Cte de Grace will bring to his
to follow him, and to have them operate on the spot
and with the greatest vigor in accordance with the plan determined
by General Washington and Count de Rochambeau
in their particular conferences, and as
there was not a moment to lose in fulfilling these different objects (goals)
and that the French camped at Philippsburg could go in eight marches
to the points on the Delaware that were indicated to them,
after having accompanied the American army to the position that
General Washington would have liked to choose. In connection with this
new arrangement, it would be proposed to agree with


2

Mr. de Grace that just crossed in front of and at the level of the capes of
the Delaware, and that it was in this river or at its mouth
that the French troops under the orders of M. le cte de Rochambeau
were embarked to be carried afterwards to the
Chesapeack Bay, Charlestown, or any other point
ordered by General Washington

M. de Bevile and a commissioner of wars, ordered in advance
to reconnoiter the camps to be taken,
and the subsistence that could be obtained, between the North
and the Delaware, could also be secured at
Trenton, Philadelphia, Chester and other places, of all the ships
of all the vessels which would be necessary to add to those which would be
provided by the squadron, for the transportation of the troops and
and effects of the army.

Upon the arrival of M. de Grace in North America
M. de Cornwallis must naturally return to Charlestown
in a hurry. If he had persisted in remaining in Porthmouth, he
would be so compromised that there would be no need to
to attack him there after having landed the troops
with safety in the bay of Chesapeack. According to all
appearance he would be beaten and could be taken. If on the contrary
he has returned to New York or Charlestown, Virginia
will be delivered, and it would probably not be impossible to attack
the English successfully, in Charlestown or at Savanah.


3

These various attempts will at least prove to America
that we served her as soon as we had the means.
I will add to these reflections that if the troops brought by
de Grace are not to remain with us this winter, they must be used
without loss of time, that any enterprise on New York,
independently of the very great uncertainty of
success, would entail such slow preliminary arrangements
either to obtain the subsistence, or for the transport
and supplies necessary for such a great attempt,
that there would remain no hope of being able
to seize this place before the end of this campaign,
that it must always be remembered that it is defended by
by a squadron embossed in the Hook, and guarded
by ten thousand men of troops accustomed for five or six years to the
to the events of war, and whose leaders,
who have a reputation, have the most interesting cause to defend in the face
the most interesting and
most decisive for their nation, that it would take at least
eight or ten thousand men on Long Island, eight thousand on the point
on the point of Kingsbridge, and four thousand on Staten
Island, to close in on the English in New York and to prevent
and to dare them any kind of communication with the
continent on both banks of the North River,
to attack them with some hope of success,
assuming that M. le cte de Grace, beforehand
of everything would have passed the first bar of the Hook


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and would have entered with the entirety of his squadron.
If these various objects cannot be fulfilled in full,
any enterprise on New York could lead to such an unpleasant
and such a humiliating outcome, that one need not fear
that they will ever be determined by the generals
who command us, whose experience and wisdom
are so well known, that they will undoubtedly make
the best use, and the most useful to the cause of America,
of the temporary means which they will have in their
in their hands.