MANIFEST

Brouillon lettre au prince de Condé

Title:
Brouillon lettre au prince de Condé
Creator:
Charles-Antoine Du Houx, Baron de Vioménil
Recipient:
Louis Joseph, Prince of Condé
Date Created:
1781-09-05
Location:
Philadelphia, Pennsylvania, USA
Source Identifier:
126

1

A Philadelphie , le 5 7bre 1781

Mgr

Nous sommes arrivés icy le 3 après avoir campé successivement à North Castle , Crampon , Kingsferry , où les trouppes ont passé la rivière du Nord , Suffreno , Prompton , Wipany , Bullions Tavern , Sommerset , Prenstown , Trenton , où nous avons passé la Delaware , Lion Tavern , et Philadelphie . La première division est partie ce matin pour se rendre en trois marches par Chester et Wilmington à Head of Elk , je la suivrai demain avec la seconde. Nous avons appris ce soir à six heures l’arrivée de M. de Grace avec 28 vaisseaux dans la baye de Chesapeak . Cet événement a été vivement senti par le Congrès, tandis que je m’empresse de vous en instruire, on allume des feux de joie de tous côtés, toutes les cloches et les cris du peuple se font entendre, M de la Luzerne a en deux mille personnes de touttes les classes à sa porte, il a été harangué par des gens considérables un quart d’heure après l’arrivée de cette nouvelle. S’il en résulte de plus grands efforts de la part des provinces que nous allons secourir, cette campagne qui s’annonçait bien tristement finira peu être par être aussi glorieuse et utile qu’elle aura été fatiguante. M. de Grace a déjà fait débarquer à l’entrée de la rivière de James


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les régiments d’Agenais, du Gattinais, et de Touraine qu’il a amené avec luy. On nous annonce même qu’ils seront réunis aux trouppes que commande M. de La Fayette . Si au moment de cette jonction Cornwallis était encor à York , avec les cinq mille hommes d’élite qu’il commande, il subira de grandes humiliations soit qu’il se décide à percer le corps de nos français réunis à M. de La Fayette pour retourner à Charlestown , soit qu’il continue à se retrancher à York ]], où nous serons en mesure de l’attaquer vers la fin de ce mois avec des forces suffisantes pour le prendre ou le détruire. Notre petite armée s’embarquera à Head of Elk , pour être portée en deux ou trois jours par la baye de Chesapeack ]], au point où s’opérera notre réunion à l’escadre de M. de Grace et aux trouppes qu’il a amenées. MM de Washington et de Rochambeau sont partis ce matin pour accélérer et multiplier tous les moyens de notre embarquement. Dans quinze jours nous serons tous à cent lieux d’icy et en mesure d’opérer. Si Cornwallis a échapé, la Virginie sera délivrée entièrement, et nous tenterons peu être de rendre le même service aux Carolines . Enfin voicy un moment bien intéressant. Malgré les fatigues nos soldats se portent à merveille et ne donnent pas occasion à la moindre plainte. Il est possible qu’ils ayent fait plus de 300 lieux à la fin de cette campagne, l’espérance d’être utile a remonté touttes les têtes. Le général Head est resté à la rive gauche de l’ Hudson avec inq mille hommes de trouppes continentales à l’entrée des gorges de West Point . Clinton cherchera sans doutte


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employer tous les moyens qui luy sont restés à New York pour l’entamer et pour viser le Conecticut et les Jerseys , mais il ne sauvera pas la Virginie .L’amiral Hood s’est réuni à Graves dans le Hook , à la fin du mois dernier. Ils sont mis à la voile quelques jours après avec 20 vaisseaux ayant le cap au sud. S’ils n’ont pas porté de trouppes à Charlestown et que Cornwalis n’y soit pas retourné de vitesse, avant le débarquement des trouppes de M. de Grace , nous sommes si bien lancés qu’après avoir compté avec Cornwallis en Virginie , je ne serais pas surpris que nous fissions le siège de Charlestown , avant la fin de la campagne. Cette dernière tentative sera subordonnée touttefois au tems que poura donner M. de Grace à l’appuy des intérêts de l’Amérique. M. de Barras est parti de Newport le 25 du mois dernier. S’il est actuellement dans la baye de Chesapeack comme nous l’espérons, l’escadre de M. de Grace est composée de 36 vaisseaux et d’un grand nombre de frégattes. Voila le tableau exact de la situation des affaires de l’Amérique, j’aurai grand soin de vous instruire avec exactitude des moindres événements de notre campagne.

M. le cher de la Luzerne nous a reçu icy d’une manière parfaitte et avec la plus grande magnificence. Il est adoré des américains et jouit de la plus grande considération auprès du Congrès.


1

In Philadelphia, on the 5th of September 1781

Mgr (Monseigneur)

We arrived here on the 3rd after having camped successively
at North Castle, Crampon, Kingsferry, where the troops passed
the North river, Suffreno, Prompton, Wipany, Bullions Tavern,
Sommerset, Prenstown, Trenton, where we passed the Delaware,
Lion Tavern, and Philadelphia. The first division left
this morning to proceed in three marches by Chester and Wilmington
to Head of Elk, I will follow tomorrow with the second. We
learned this evening at six o'clock of the arrival of M. de Grace with 28
vessels in Chesapeak Bay. This event was
keenly felt by the Congress, while
I hasten to inform you of it, bonfires are lit on all sides, all the
bells and cries of the people are heard, M. de la Luzerne
has two thousand people of all classes at his door, he was
harangued by considerable people a quarter of an hour after
the arrival of this news. If it results in greater
efforts on the part of the provinces which we are going to help, this
campaign, which was announced very sadly, will end up being
as glorious and useful as it has been tiring. M. de
Grace has already landed at the entrance to the James River


2

the regiments of Agenais, Gattinais, and Touraine that he brought
with him. We are even told that they will be joined to the troops that
M. de La Fayette commands. If at the time of this junction Cornwallis
was still at York, with the five thousand elite men he commands
he will suffer great humiliation, either if he decides to break through the
body of our Frenchmen gathered with M. de La Fayette to return to
to Charlestown, or that he continues to entrench himself at York
where we shall be able to attack him towards the end of this month with
sufficient forces to take or destroy it. Our little
army will embark at Head of Elk, to be carried in two or three days
by Chesapeack Bay, to the point where
our meeting with the squadron of Mr. de Grace and the troops
he has brought. Messrs. de Washington and de Rochambeau left
this morning to accelerate and multiply all the means of our
embarkation. In fifteen days we will all be a hundred places from
from here and in a position to operate. If Cornwalis has escaped, the
Virginia will be entirely delivered, and we may attempt to render
the same service to the Carolinas. At last here is a very
interesting moment. In spite of the fatigues our soldiers are doing wonderfully
and do not give occasion for the least complaint. It is possible that they
made more than 300 [lieux ]at the end of this campaign, the hope of being useful has lifted all heads. General Head remained at
the left bank of the Hudson with five thousand men of continental troops
at the entrance to West Point Gorge. Clinton will undoubtedly seek


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to use all the means that remained to him in New York to begin this
and to aim at Conecticut and the Jeyseys, but he will not save
Virginia. Admiral Hood met at Graves in the Hook, at the end of
of last month. They set sail a few days later with 20 vessels
heading south. If they did not carry troops to Charlestown
and Cornwalis did not return there in a hurry, before the
landing of M. de Grace's troops, we are so well launched
that after reckoning with Cornwalis in Virginia, I should not be
surprised if we laid siege to Charlestown before the end of the
campaign. This last attempt will be subordinated, however, to the time
that M. de Grace can give to support the interests of America.
M. de Baras left Newport on the 25th of last month. If he is
in Chesapeack Bay as we hope,
Mr. de Grace's squadron is composed of 36 ships and
a large number of frigates. This is the exact picture of the
situation of the affairs of America,
I will take great care to inform you accurately of the slightest events of our campaign.

M. de la Luzerne received us here in a perfect manner
and with the greatest magnificence. He is adored by the Americans and
enjoys the greatest consideration in Congress.