Au camp de Philippsburg le 8 juillet 1781
J’ay eu l’honneur de vous instruire successivement princesse du peu d’événement qui nous sont arrivés dans cette partie du monde , mais quoyque j’ignore si mes lettres vous sont parvenues, je ne veux cependant manquer aucune occasion de ma rappeller à votre souvenir, et de vous renouveller l’homage de mon respectuex attachement.
Notre petite armée s’est réunie depuis deux jours à celle du général Washington nous sommes assez forts dans le camp que nous occupons pour désirer d’y être attaqués, mais trop faibles cependant pour que nous puissions faire aucune entreprise sur New York , toutes nos forces réunies ne montent pas à neuf mille hommes, dans cet état des choses je prévois que cette campagne s’achèvera dans cette position, sans aucun événement qui puisse intéresser. On a beau nous flatter que l’arrivée de M. de Grace que l’on nous annonce pour la fin de ce mois ou les premiers jours de l’autre nous tirera de l’inaction à laquelle nous sommes dévoués, je ne m’attends pas d’abord qu’elle soit si prochaine, et comme il n’amènera pas d’ailleurs à sa suitte assez de moyens, pour que nous puissons faire le siège de New York , tout ce que noyus pouvons désirer raisonablement dans notre situation, c’est que notre faible représentation en Amérique ait été suffisante à M. de Vergennes pour qu’il puisse assurer cet hyver à la France une paix aussi glorieuse qu’elle aurait pu l’être, si on